Édito

La belle histoire de la « Miséricorde Divine »

Depuis l’an 2000, la Miséricorde Divine est fêtée chaque 2ème dimanche de Pâques. L’histoire de cette fête commence avec Soeur Faustine (1905-1938), une religieuse polonaise à qui le Christ a choisi d’apparaître. Un jour de février 1931, le Christ lui explique qu’il désire « que le 2ème dimanche après Pâques soit la fête de la Miséricorde ». Ce jour-là en particulier, « les entrailles de ma miséricorde sont ouvertes, je déverse tout un océan de grâces sur les âmes qui s’approcheront de la source de ma miséricorde (…).

Jésus demande aussi à la religieuse de peindre un tableau conforme à cette description : « Jésus vêtu d’une tunique blanche, une main levée pour bénir, la seconde touchait son vêtement sur la poitrine. De la tunique entrouverte sur la poitrine sortaient deux grands rayons, l’un rouge, l’autre pâle. ». Faustine doit ajouter au tableau la mention : « Jésus, j’ai confiance en Toi ». On trouve ce tableau dans notre église à deux endroits… (vous avez trouvé ?)
Jésus veut que ce tableau, mais aussi cette fête liturgique, soient répandus partout dans le monde et dans l’église, au-delà des frontières polonaises. Mais comment Faustine pourrait-elle répondre à ce désir du Christ tout en restant cloîtrée ? Devra-t-elle sortir de son couvent ? Devra-t-elle se rendre à Rome ? Jésus va se débrouiller autrement, et c’est une belle histoire !
A cette époque, un certain étudiant polonais passait régulièrement au couvent où vivait encore Sr Faustine deux ans auparavant. L’étudiant sera un des premiers à découvrir ce message de Miséricorde de Jésus à Sr Faustine, et il en sera bouleversé. Une fois devenu prêtre, puis évêque, puis Pape, puis… (ah non on s’arrête là), cet étudiant fera tout pour faire connaître ce message. L’étudiant Wojtila devenu Jean-Paul II canonisera lui-même Sr Faustine en l’an 2000, le jour où enfin il instituera la fête de la Miséricorde Divine pour toute l’Église. Et c’est pourquoi « la lumière de la miséricorde divine (…) illumine le chemin des hommes du IIIe millénaire ». Il est impressionnant de noter que Jean-Paul II rendra son dernier souffle le jour de cette fête, le 2 avril 2005, 5 ans après l’avoir instituée. Et parce que la Providence a du mal à s’arrêter, Jean-Paul II sera béatifié un deuxième dimanche de Pâques en 2011. Notre pape actuel, François, a voulu s’inscrire dans cette lumière de miséricorde pour notre siècle. Il ne cesse de la prêcher en la rattachant à la vie affective, sociale et spirituelle. Et il se rendra à Cracovie pour les JMJ de 2016, tout en faisant vivre à l’Église une année de la Miséricorde dont nous nous souvenons encore.
Nous sommes bien dans le siècle de la miséricorde infinie de Dieu ! La date voulue par Jésus pour cette fête met en lumière le lien entre le Mystère Pascal et la Miséricorde. La miséricorde est la seule limite au mal. Cette limite ce sont les bras étendus de Jésus sur la croix. Le mal ne peut franchir la croix. L’au-delà de la croix, c’est la résurrection.

Père Baptiste

Regarde l’autre

Harriet Tubman : la Moïse de son peuple

Araminta Ross naît en 1822, sur une plantation du sud des États-Unis, où ses parents sont soumis au régime esclavagiste. En 1844, tout en demeurant la « propriété » d’un esclavagiste,
Araminta se marie avec un homme libre, John Tubman et prend le prénom « Harriet. »

À la mort de son maître esclavagiste en 1849, elle prend la fuite et parvient à la liberté au Nord, à Philadelphie. Harriet Tubman réussit à libérer environ 70 personnes au cours de 13 voyages de
sauvetage grâce au réseau qu’elle développe, l’Underground Railroad. Elle communique également des directions pour fuir à des centaines d’autres personnes. Ses efforts sont au risque constant de sa vie, car les esclaves fugitifs sont activement recherchés.
Pendant la Guerre civile américaine (1861-1865) opposant les États-Unis, « l’Union, » et les onze états esclavagistes du Sud, « la Confédération », elle se porte volontaire pour être éclaireuse, espionne et infirmière pour l’armée de l’Union. A la fin de la guerre, elle ouvre sa maison aux personnes démunies, aux orphelins et aux personnes sans abri. Elle s’engage progressivement dans le mouvement pour le droit de vote des femmes. Avec l’aide de sa communauté ecclésiale, l’African Methodist Episcopal Zion Church, elle fonde une maison de soins pour personnes âgées et malades en 1908. Souffrante, elle y entre elle-même et y meurt en 1913.
C’est par l’intermédiaire de ses biographes qui transcrivent ses témoignages qu’il est possible de tracer le cheminement spirituel d’Harriet Tubman, car elle ne sait ni lire ni écrire. Pendant sa jeunesse, elle ne connaît pas de pratique chrétienne rituelle dans les Églises établies qui sont d’ailleurs souvent complices du régime esclavagiste. Elle apprend l’histoire du salut de Dieu grâce aux récits bibliques transmis le plus souvent par les chants de spirituals qui s’inspirent surtout du livre de l’Exode et de la passion du Christ. Racontant sa relation à Dieu, elle l’évoque comme la présence d’un ami tout proche, d’un soutien sans faille, d’un Sauveur qui l’accompagne et la guide, tout comme la colonne de nuée ou de feu à la tête du peuple d’Israël au désert (Ex 13, 21-22). Elle explique rester en relation avec Dieu par une prière persévérante de supplication, lui présentant sans cesse ses besoins (Eph 6,18).
Un chemin de conversion personnelle ouvre la voie à sa propre libération et lui permet d’assumer la mission de libératrice à son tour. Arrivée au Nord, son récit évoque une renaissance
spirituelle ainsi qu’une détermination de partage de liberté, « Il y avait une telle gloire partout, le soleil brillait comme de l’or à travers les arbres et les champs. Je me suis sentie comme au ciel… J’étais libre et ils devaient l’être, aussi ! »
L’héritage d’Harriet Tubman nous apprend la relation à Dieu par la prière comme force vivifiante et l’importance des liens communautaires pour mieux porter ensemble tout au long de la vie la défense des droits des plus vulnérables, à l’image de Dieu qui voit la misère et entend les cris de son peuple en souffrance (Ex 3,7).

Katherine SHIRK LUCAS