Auteur/autrice : Etienne CETAIRE Page 1 of 12

Pape François 1936-2025

Paroles du Pape François

Il y a de la place pour tout le monde dans l’Église, pour tout le monde ! Personne n’est inutile, personne n’est superflu, il y a de la place pour tout le monde. Tel que nous sommes, tout le monde. Et Jésus le dit clairement quand il envoie les apôtres inviter au banquet de cet homme qui l’avait préparé, il dit : “Allez chercher tout le monde, jeunes et vieux, bien portants et malades, justes et pécheurs : tous, tous, tous”. Dans l’Église, il y a de la place pour tous. 

«Ne nous laissons pas voler l’espérance! »

« Tous les jours, Dieu passe dans notre vie ».

« Si quelquefois Dieu semble ne pas nous aider, cela ne signifie pas qu’il nous a abandonnés, mais qu’il nous fait confiance, qu’il fit confiance en ce que nous pouvons projeter , inventer, trouver. »

« Nous sommes venus au monde pour ressusciter: nous ne sommes pas nés pour la mort, mais pour la résurrection.  En effet, comme écrit  […] Saint Paul , déjà maintenant «  notre citoyenneté est dans les cieux » (Ph 3, 20) et, comme dit Jésus dans l’Evangile nous serons ressuscités le dernier jour (cf Jn6,40) »

Parcours Re-découverte

Faire mémoire

Nous venons de vivre une octave de Pâques bien particulière, marquée par le décès du Pape François. Une semaine en miroir de la Semaine Sainte, qui m’a donné de réfléchir sur l’importance de la commémoration. Faire mémoire, ne se trouve-t-il pas au fondement du judaïsme et du christianisme ? N’est-ce pas l’origine des Evangiles : écrire pour fixer la mémoire ? le sens de notre liturgie, et de nos fêtes ? On rappelle souvent que la première prière du peuple de Dieu est « Shmah Israël » Ecoute Israël. Mais qu’est-ce que l’écoute sans la mémoire ? Nous lisons les textes, nous les écoutons. Certes, mais l’évangile de Luc semble nous dire que ce n’est pas suffisant lorsqu’il raconte le manque de mémoire (ou de foi) de Zacharie face à l’ange lui annonçant la grossesse de sa femme. Ce prêtre pourtant « juste devant Dieu », connaissait très bien les Ecritures. Il aurait dû savoir que c’était possible, c’est arrivé à Sarah. Conséquence ? Mutisme temporaire. Ce n’est qu’à la naissance de son fils, qu’il retrouve sa voix pour témoigner, et crier un cantique. Mais alors, comment bien faire mémoire ? Un véritable défi dans un monde marqué par l’immédiateté, la dispersion numérique, l’hyperactivité… Le Triduum nous montre un chemin : en prenant collectivement le temps, un temps long qui nous permette de dépasser le souvenir rapide (ah oui c’est Pâques ! le Pape est mort…) de faire descendre l’information jusqu’au cœur jusqu’à ressentir ce qui s’est joué / se joue ; un effort d’incarnation ; que notre imagination se saisisse des scènes décrites ou rejouées pour que nous les investissions émotionnellement. Il me semble que c’est la visée de la liturgie, des lectures, du lavement des pieds, des chemins de croix, des films, spectacles etc. : nous aider à réactiver la mémoire. Mais l’Eglise nous invite ensuite à témoigner individuellement, alors comment s’y prendre ? Lors d’une retraite en février, le père Henri de Villefranche qui la prêchait nous avait donné un exercice dont je n’avais pas saisi toute la portée : « Ecrivez votre Evangile », « Ecrivez votre Cantique » avait-il dit.

En gros : relecture personnelle de votre histoire et action de grâce pour tout ce que Dieu nous a déjà donné par la prière, sa Parole et les personnes mises sur votre route ! Mon évangile, je ne l’ai pas écrit, mais le pape François y occuperait une place. Sa mort me touche car c’est par la lecture de son encyclique Laudato Si’ que j’ai fait un bond en avant dans ma vie de foi, et me suis engagée en Eglise. En me raccrochant à sa figure à bien des moments quand je me sentais illégitime ou décalée. Son regard sur le monde et les concepts qu’il formulait m’avaient profondément touchée et permis d’unifier ma vie « civile » et ma vie de foi. Par sa simplicité, son ouverture d’esprit, son côté « poil à gratter », sa critique radicale des modes de vies consuméristes, ses mises en gardes contre ce que j’appellerais un certain pharisianisme, replaçant la charité au premier plan, allant aux périphéries, appelant à la paix, à l’accueil, il incarnait et actualisait pour moi l’֤Évangile.

Pour toutes ces raisons je tenais à l’heure de sa mort à faire mémoire de ses mots et gestes qu’il a posés à la suite du Christ. J’espère qu’eux non plus ne passeront pas et se feront Tradition, qu’ils en appelleront d’autres à l’engagement et que sa mort ne nous fera pas abandonner les initiatives de conversion écologique et d’attention aux plus fragiles. Mais qu’au contraire, par toute la terre, nous fassions mémoire, et sortions des tombeaux pour témoigner à notre tour par nos évangiles, à la fois à la suite et en communion avec ceux qui nous ont précédés. Amen

Pauline H

“ MARIE ! ”

Il y a une fraction de seconde dans l’histoire de l’Humanité qui a TOUT changé.
Nous sommes 3 jours après la crucifixion. Jésus est mort et enterré. Ce qui avait semblé être l’avènement d’un Sauveur s’est terminé en douche froide, en déconfiture totale, en foirade complète, mais aussi en humiliation, en exécution et mort, dans le sang, la boue et les larmes… et l’abandon. Quasiment personne ne s’est rendu au Golgotha voir Jésus nu et sanglant pousser ses derniers cris. Sauf quelques fidèles : sa mère Marie, Jean, Marie-Madeleine… Il ne reste que l’amertume, l’obscurité, la déception, le désespoir. Le Monde n’a pas été sauvé. Le Mal et l’Injustice ont triomphé. Jésus n’a pas tenu ses promesses.

Au petit matin, Marie-Madeleine se rend devant la tombe de Jésus. Tout n’est que ténèbres, en-dehors d’elle, en elle. Elle vient de perdre l’homme qui comptait plus que tout au monde pour elle. La raison, et la racine même de son existence. Elle l’a vu détruire méthodiquement, jusqu’à ce qu’il devienne presque une bouillie d’humain, méconnaissable. L’espoir d’une nation, d’un peuple, du genre humain? Ecrasé, avorté. Dans leur groupe ? La désunion, les trahisons, la lâcheté, la crasse de la médiocrité, et la peur, l’insondable PEUR.  

Et pourtant, ce matin, le tombeau est ouvert. Et pourtant, les signes s’accumulent. Jean, Pierre, les deux hommes en blanc mystérieux dans le tombeau… Des bourgeons d’espoir commencent à pointer. Mais elle n’ose encore y croire. Elle ne survivrait pas à ce que son espérance soit de nouveau déçue. Elle échange avec le jardinier (en fait Jésus, qu’elle ne reconnaît pas), et…

Jésus lui dit alors : “Marie!” (Jn 20, 16). Et en un éclair elle comprend. En une fraction de seconde, elle voit que le Sauveur est ressuscité. En une fraction de seconde, l’Histoire de l’Humanité, complètement figée, arrêtée dans son élan, détruite par un fiasco invraisemblable, peut repartir. Tout est accompli. Le Christ est ressuscité. Le monde a un sens, le monde retrouve un sens. Marie-Madeleine passe de la mort à la vie.

C’est tout l’enseignement de Pâques. Nous revivons ce moment en communauté, où nous sortons nous-même de la tombe, cette tombe ouverte comme une bouche qui crie : “je suis vivant”. Nous accueillons dans ce moment nos 14 nouveaux futurs baptisés, dont le nombre croissant d’année en année est un témoignage vivant d’un renouveau de l’Eglise. Là aussi, quelque chose germe à nouveau.

Mais Pâques, ce n’est pas qu’un moment. Pâques, c’est à chaque instant, à chaque seconde, de la vie à la mort, de la mort à la vie, continûment. La Terre est peuplée de gens qui attendent qu’on les appelle par leur nom. Des gens enfermés dans leur détresse. A l’image du Christ, appelons-les par leur nom. Appelons-les par leur nom, sans cesse.

Ludovic K

SON VISAGE

Comme je réfléchissais au thème de ce texte, j’ai découvert qu’il paraîtra le dimanche de la Transfiguration. Étrange paradoxe, une image m’est alors violemment revenue en mémoire : une couverture de Charlie hebdo du 13 mars 2019.

Un Christ crucifié y était caricaturé, dans le but de stigmatiser les abus sexuels dans l’Église et le scandaleux silence qui les a trop longtemps couverts. Je me souviens m’être arrêtée, sidérée, devant sa reproduction en grand format au flanc d’un kiosque à journaux. J’étais à la fois choquée, blessée, et admirative du talent iconoclaste de l’illustratrice Coco, rescapée du massacre du 7 janvier 2015. On voit sur cette page un Christ couronné d’épines, un sexe masculin faisant office de long nez et de lourdes paupières qui lui tombent sur les yeux. De part et d’autre de la croix, deux rouleaux annoncent le thème du numéro. D’un côté : « Pédophilie, l’Église… » De l’autre : « …ouvre enfin les yeux ». Le Christ, ayant arraché une de ses mains au clou qui la retenait au bois, soulève d’un doigt sa « paupière » gauche et nous fixe d’un œil effaré.

Oui, l’image est cruellement choquante. Mais ce qu’elle dénonce l’est tout autant. D’ailleurs, il ne devait pas être beau à voir, le Crucifié ! Un passage y fait écho dans Le Maître et Marguerite, le fabuleux roman de Boulgakov : « Yechoua leva alors la tête. Les mouches s’envolèrent en bourdonnant, et l’on vit apparaître un visage aux yeux gonflés, boursoufflé par les morsures, un visage méconnaissable. » Ce n’est pas si loin de la description du prophète Isaïe : « Homme de douleurs, (…), il était pareil à celui devant qui on se voile la face. » « Sujet d’effroi tant son visage était défiguré. (…)En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé.» Ainsi que, oserais-je ajouter, le poids inimaginable des péchés du monde  et des nôtres.

Au fond, rien d’étonnant à ce que, pensant à la Transfiguration, je me sois rappelée cette caricature qui évoque – sans l’avoir voulu sans doute –  le serviteur souffrant d’Isaïe. Lorsque Jésus emmène avec lui Pierre, Jacques et Jean sur la montagne, il leur offre une vision de gloire, qui les prépare – et nous prépare – à vivre le traumatisme de la Passion. Déjà, il leur a annoncé qu’il fallait « que le Fils de l’homme souffre beaucoup ». Bientôt, il les appellera à le suivre au jardin de l’agonie. Puis le visage transfiguré sur le Thabor sera défiguré au Golgotha. Sur mon chemin de carême, j’aimerais garder au cœur ces deux visages pour ne pas oublier que l’un ne va pas sans l’autre. Mais que la face rayonnante du Ressuscité nous attend au matin de Pâques !

 Marie-Hélène D.

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