Auteur/autrice : Etienne CETAIRE Page 2 of 13

Faire mémoire

Nous venons de vivre une octave de Pâques bien particulière, marquée par le décès du Pape François. Une semaine en miroir de la Semaine Sainte, qui m’a donné de réfléchir sur l’importance de la commémoration. Faire mémoire, ne se trouve-t-il pas au fondement du judaïsme et du christianisme ? N’est-ce pas l’origine des Evangiles : écrire pour fixer la mémoire ? le sens de notre liturgie, et de nos fêtes ? On rappelle souvent que la première prière du peuple de Dieu est « Shmah Israël » Ecoute Israël. Mais qu’est-ce que l’écoute sans la mémoire ? Nous lisons les textes, nous les écoutons. Certes, mais l’évangile de Luc semble nous dire que ce n’est pas suffisant lorsqu’il raconte le manque de mémoire (ou de foi) de Zacharie face à l’ange lui annonçant la grossesse de sa femme. Ce prêtre pourtant « juste devant Dieu », connaissait très bien les Ecritures. Il aurait dû savoir que c’était possible, c’est arrivé à Sarah. Conséquence ? Mutisme temporaire. Ce n’est qu’à la naissance de son fils, qu’il retrouve sa voix pour témoigner, et crier un cantique. Mais alors, comment bien faire mémoire ? Un véritable défi dans un monde marqué par l’immédiateté, la dispersion numérique, l’hyperactivité… Le Triduum nous montre un chemin : en prenant collectivement le temps, un temps long qui nous permette de dépasser le souvenir rapide (ah oui c’est Pâques ! le Pape est mort…) de faire descendre l’information jusqu’au cœur jusqu’à ressentir ce qui s’est joué / se joue ; un effort d’incarnation ; que notre imagination se saisisse des scènes décrites ou rejouées pour que nous les investissions émotionnellement. Il me semble que c’est la visée de la liturgie, des lectures, du lavement des pieds, des chemins de croix, des films, spectacles etc. : nous aider à réactiver la mémoire. Mais l’Eglise nous invite ensuite à témoigner individuellement, alors comment s’y prendre ? Lors d’une retraite en février, le père Henri de Villefranche qui la prêchait nous avait donné un exercice dont je n’avais pas saisi toute la portée : « Ecrivez votre Evangile », « Ecrivez votre Cantique » avait-il dit.

En gros : relecture personnelle de votre histoire et action de grâce pour tout ce que Dieu nous a déjà donné par la prière, sa Parole et les personnes mises sur votre route ! Mon évangile, je ne l’ai pas écrit, mais le pape François y occuperait une place. Sa mort me touche car c’est par la lecture de son encyclique Laudato Si’ que j’ai fait un bond en avant dans ma vie de foi, et me suis engagée en Eglise. En me raccrochant à sa figure à bien des moments quand je me sentais illégitime ou décalée. Son regard sur le monde et les concepts qu’il formulait m’avaient profondément touchée et permis d’unifier ma vie « civile » et ma vie de foi. Par sa simplicité, son ouverture d’esprit, son côté « poil à gratter », sa critique radicale des modes de vies consuméristes, ses mises en gardes contre ce que j’appellerais un certain pharisianisme, replaçant la charité au premier plan, allant aux périphéries, appelant à la paix, à l’accueil, il incarnait et actualisait pour moi l’֤Évangile.

Pour toutes ces raisons je tenais à l’heure de sa mort à faire mémoire de ses mots et gestes qu’il a posés à la suite du Christ. J’espère qu’eux non plus ne passeront pas et se feront Tradition, qu’ils en appelleront d’autres à l’engagement et que sa mort ne nous fera pas abandonner les initiatives de conversion écologique et d’attention aux plus fragiles. Mais qu’au contraire, par toute la terre, nous fassions mémoire, et sortions des tombeaux pour témoigner à notre tour par nos évangiles, à la fois à la suite et en communion avec ceux qui nous ont précédés. Amen

Pauline H

“ MARIE ! ”

Il y a une fraction de seconde dans l’histoire de l’Humanité qui a TOUT changé.
Nous sommes 3 jours après la crucifixion. Jésus est mort et enterré. Ce qui avait semblé être l’avènement d’un Sauveur s’est terminé en douche froide, en déconfiture totale, en foirade complète, mais aussi en humiliation, en exécution et mort, dans le sang, la boue et les larmes… et l’abandon. Quasiment personne ne s’est rendu au Golgotha voir Jésus nu et sanglant pousser ses derniers cris. Sauf quelques fidèles : sa mère Marie, Jean, Marie-Madeleine… Il ne reste que l’amertume, l’obscurité, la déception, le désespoir. Le Monde n’a pas été sauvé. Le Mal et l’Injustice ont triomphé. Jésus n’a pas tenu ses promesses.

Au petit matin, Marie-Madeleine se rend devant la tombe de Jésus. Tout n’est que ténèbres, en-dehors d’elle, en elle. Elle vient de perdre l’homme qui comptait plus que tout au monde pour elle. La raison, et la racine même de son existence. Elle l’a vu détruire méthodiquement, jusqu’à ce qu’il devienne presque une bouillie d’humain, méconnaissable. L’espoir d’une nation, d’un peuple, du genre humain? Ecrasé, avorté. Dans leur groupe ? La désunion, les trahisons, la lâcheté, la crasse de la médiocrité, et la peur, l’insondable PEUR.  

Et pourtant, ce matin, le tombeau est ouvert. Et pourtant, les signes s’accumulent. Jean, Pierre, les deux hommes en blanc mystérieux dans le tombeau… Des bourgeons d’espoir commencent à pointer. Mais elle n’ose encore y croire. Elle ne survivrait pas à ce que son espérance soit de nouveau déçue. Elle échange avec le jardinier (en fait Jésus, qu’elle ne reconnaît pas), et…

Jésus lui dit alors : “Marie!” (Jn 20, 16). Et en un éclair elle comprend. En une fraction de seconde, elle voit que le Sauveur est ressuscité. En une fraction de seconde, l’Histoire de l’Humanité, complètement figée, arrêtée dans son élan, détruite par un fiasco invraisemblable, peut repartir. Tout est accompli. Le Christ est ressuscité. Le monde a un sens, le monde retrouve un sens. Marie-Madeleine passe de la mort à la vie.

C’est tout l’enseignement de Pâques. Nous revivons ce moment en communauté, où nous sortons nous-même de la tombe, cette tombe ouverte comme une bouche qui crie : “je suis vivant”. Nous accueillons dans ce moment nos 14 nouveaux futurs baptisés, dont le nombre croissant d’année en année est un témoignage vivant d’un renouveau de l’Eglise. Là aussi, quelque chose germe à nouveau.

Mais Pâques, ce n’est pas qu’un moment. Pâques, c’est à chaque instant, à chaque seconde, de la vie à la mort, de la mort à la vie, continûment. La Terre est peuplée de gens qui attendent qu’on les appelle par leur nom. Des gens enfermés dans leur détresse. A l’image du Christ, appelons-les par leur nom. Appelons-les par leur nom, sans cesse.

Ludovic K

SON VISAGE

Comme je réfléchissais au thème de ce texte, j’ai découvert qu’il paraîtra le dimanche de la Transfiguration. Étrange paradoxe, une image m’est alors violemment revenue en mémoire : une couverture de Charlie hebdo du 13 mars 2019.

Un Christ crucifié y était caricaturé, dans le but de stigmatiser les abus sexuels dans l’Église et le scandaleux silence qui les a trop longtemps couverts. Je me souviens m’être arrêtée, sidérée, devant sa reproduction en grand format au flanc d’un kiosque à journaux. J’étais à la fois choquée, blessée, et admirative du talent iconoclaste de l’illustratrice Coco, rescapée du massacre du 7 janvier 2015. On voit sur cette page un Christ couronné d’épines, un sexe masculin faisant office de long nez et de lourdes paupières qui lui tombent sur les yeux. De part et d’autre de la croix, deux rouleaux annoncent le thème du numéro. D’un côté : « Pédophilie, l’Église… » De l’autre : « …ouvre enfin les yeux ». Le Christ, ayant arraché une de ses mains au clou qui la retenait au bois, soulève d’un doigt sa « paupière » gauche et nous fixe d’un œil effaré.

Oui, l’image est cruellement choquante. Mais ce qu’elle dénonce l’est tout autant. D’ailleurs, il ne devait pas être beau à voir, le Crucifié ! Un passage y fait écho dans Le Maître et Marguerite, le fabuleux roman de Boulgakov : « Yechoua leva alors la tête. Les mouches s’envolèrent en bourdonnant, et l’on vit apparaître un visage aux yeux gonflés, boursoufflé par les morsures, un visage méconnaissable. » Ce n’est pas si loin de la description du prophète Isaïe : « Homme de douleurs, (…), il était pareil à celui devant qui on se voile la face. » « Sujet d’effroi tant son visage était défiguré. (…)En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé.» Ainsi que, oserais-je ajouter, le poids inimaginable des péchés du monde  et des nôtres.

Au fond, rien d’étonnant à ce que, pensant à la Transfiguration, je me sois rappelée cette caricature qui évoque – sans l’avoir voulu sans doute –  le serviteur souffrant d’Isaïe. Lorsque Jésus emmène avec lui Pierre, Jacques et Jean sur la montagne, il leur offre une vision de gloire, qui les prépare – et nous prépare – à vivre le traumatisme de la Passion. Déjà, il leur a annoncé qu’il fallait « que le Fils de l’homme souffre beaucoup ». Bientôt, il les appellera à le suivre au jardin de l’agonie. Puis le visage transfiguré sur le Thabor sera défiguré au Golgotha. Sur mon chemin de carême, j’aimerais garder au cœur ces deux visages pour ne pas oublier que l’un ne va pas sans l’autre. Mais que la face rayonnante du Ressuscité nous attend au matin de Pâques !

 Marie-Hélène D.

MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS POUR LE CARÊME 2025

Marchons ensemble dans l’espérance

Chers frères et sœurs, avec le signe pénitentiel des cendres sur la tête, nous commençons le pèlerinage annuel du Saint Carême dans la foi et dans l’espérance. L’Église, mère et maîtresse, nous invite à préparer nos cœurs et à nous ouvrir à la grâce de Dieu pour que nous puissions célébrer dans la joie le triomphe pascal du Christ-Seigneur, sur le péché et sur la mort. Saint Paul le proclame : « La mort a été engloutie dans la victoire. Ô Mort, où est ta victoire ? Ô Mort, où est-il, ton aiguillon ? » ( 1 Co 15, 54-55). En effet, Jésus-Christ, mort et ressuscité, est le centre de notre foi et le garant de la grande promesse du Père qu’est la vie éternelle déjà réalisée en son Fils bien-aimé (cf. Jn 10, 28 ; 17, 3). [1]

Je voudrais proposer à l’occasion de ce Carême, enrichi par la grâce de l’année jubilaire, quelques réflexions sur ce que signifie marcher ensemble dans l’espérance, et découvrir les appels à la conversion que la miséricorde de Dieu adresse à tous, en tant qu’individus comme en tant que communautés.

Tout d’abord, marcher. La devise du Jubilé, “pèlerins de l’espérance”, nous rappelle le long voyage du peuple d’Israël vers la Terre promise, raconté dans le livre de l’Exode : une marche difficile de l’esclavage à la liberté, voulue et guidée par le Seigneur qui aime son peuple et lui est toujours fidèle. Et nous ne pouvons pas évoquer l’exode biblique sans penser à tant de frères et sœurs qui, aujourd’hui, fuient des situations de misère et de violence, partant à la recherche d’une vie meilleure pour eux-mêmes et pour leurs êtres chers. Un premier appel à la conversion apparaît ici car, dans la vie, nous sommes tous des pèlerins. Chacun peut se demander : comment est-ce que je me laisse interpeller par cette condition ? Suis-je vraiment en chemin ou plutôt paralysé, statique, dans la peur et manquant d’espérance, ou bien encore installé dans ma zone de confort ? Est-ce que je cherche des chemins de libération des situations de péché et de manque de dignité ? Ce serait un bon exercice de Carême que de nous confronter à la réalité concrète d’un migrant ou d’un pèlerin, et de nous laisser toucher de manière à découvrir ce que Dieu nous demande pour être de meilleurs voyageurs vers la maison du Père. Ce serait un bon “test” pour le marcheur.

En second lieu, faisons ce chemin ensemble. Marcher ensemble, être synodal, telle est la vocation de l’Église. [2] Les chrétiens sont appelés à faire route ensemble, jamais comme des voyageurs solitaires. L’Esprit Saint nous pousse à sortir de nous-mêmes pour aller vers Dieu et vers nos frères et sœurs, et à ne jamais nous refermer sur nous-mêmes. [3] Marcher ensemble c’est être des tisseurs d’unité à partir de notre commune dignité d’enfants de Dieu (cf. Ga 3,26-28) ; c’est avancer côte à côte, sans piétiner ni dominer l’autre, sans nourrir d’envies ni d’hypocrisies, sans laisser quiconque à la traîne ou se sentir exclu. Allons dans la même direction, vers le même but, en nous écoutant les uns les autres avec amour et patience.

En ce Carême, Dieu nous demande de vérifier si dans notre vie, dans nos familles, dans les lieux où nous travaillons, dans les communautés paroissiales ou religieuses, nous sommes capables de cheminer avec les autres, d’écouter, de dépasser la tentation de nous ancrer dans notre autoréférentialité et de nous préoccuper seulement de nos propres besoins. Demandons-nous devant le Seigneur si nous sommes capables de travailler ensemble, évêques, prêtres, personnes consacrées et laïcs, au service du Royaume de Dieu ; si nous avons une attitude d’accueil, avec des gestes concrets envers ceux qui nous approchent et ceux qui sont loin ; si nous faisons en sorte que les personnes se sentent faire partie intégrante de la communauté ou si nous les maintenons en marge. [4] Ceci est un deuxième appel : la conversion à la synodalité.

Troisièmement, faisons ce chemin ensemble dans l’espérance d’une promesse. Que l’ espérance qui ne déçoit pas (cf. Rm 5, 5), le message central du Jubilé [5], soit pour nous l’horizon du chemin de
Carême vers la victoire de Pâques. Comme nous l’a enseigné le Pape Benoît XVI dans l’encyclique Spe salvi : « L’être humain a besoin de l’amour inconditionnel. Il a besoin de la certitude qui lui fait dire : “Ni la mort ni la vie, ni les esprits ni les puissances, ni le présent ni l’avenir, ni les astres, ni les cieux, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Jésus Christ” ( Rm 8, 38-39) ». [6] Jésus, notre amour et notre espérance, est ressuscité, [7] il vit et règne glorieusement. La mort a été transformée en victoire, et c’est là que réside la foi et la grande espérance des chrétiens : la résurrection du Christ !

Et voici le troisième appel à la conversion : celui de l’espérance, de la confiance en Dieu et en sa grande promesse, la vie éternelle. Nous devons nous demander : ai-je la conviction que Dieu pardonne mes péchés ? Ou bien est-ce que j’agis comme si je pouvais me sauver moi-même ? Est-ce que j’aspire au salut et est-ce que j’invoque l’aide de Dieu pour l’obtenir ? Est-ce que je vis concrètement l’espérance qui m’aide à lire les événements de l’histoire et qui me pousse à m’engager pour la justice, la fraternité, le soin de la maison commune, en veillant à ce que personne ne soit laissé pour compte ?

Sœurs et frères, grâce à l’amour de Dieu en Jésus-Christ, nous sommes gardés dans l’espérance qui ne déçoit pas (cf. Rm 5, 5). L’espérance est “l’ancre de l’âme”, sûre et indéfectible. [8] C’est en elle que l’Église prie pour que « tous les hommes soient sauvés » ( 1Tm 2,4) et qu’elle attend d’être dans la gloire du ciel, unie au Christ, son époux. C’est ainsi que s’exprime sainte Thérèse de Jésus : « Espère, ô mon âme, espère. Tu ignores le jour et l’heure. Veille soigneusement, tout passe avec rapidité quoique ton impatience rende douteux ce qui est certain, et long un temps très court » (Exclamations de l’âme à son Dieu, 15, 3). [9] Que la Vierge Marie, Mère de l’Espérance, intercède pour nous et nous accompagne sur le chemin du Carême.

Rome, Saint-Jean-de-Latran, 6 février 2025, mémoire de Saint Paul Miki et ses compagnons, martyrs.

FRANÇOIS

[1] Cf. Lett. enc. Dilexit nos (24 ottobre 2024), n. 220

[2] Cf. Homélie de la messe de canonisation des Bienheureux Giovanni Battista Scalabrini e Artemide Zatti, 9 octobre 2022.

[3] Cf. Idem.

[4] Cf. Ibid.

[5] Cf. Bulle Spes non confundit, n. 1.

[6] Lett. enc. Spe salvi (30 novembre 2007), n. 26.

[7] Cf. Séquence du dimanche de Pâques.

[8] Cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 1820.

[9] Idem., n. 1821.

Pèlerinage à Notre Dame

Samedi 1 février
Inscrivez vous

La Paroisse Saint Jean-Baptiste de Belleville fait son pèlerinage à Notre Dame.
Samedi 1er février 2025

Au programme :

  • 14h30 rendez-vous dans l’église SJBB pour ceux qui marcheront jusqu’à Notre-Dame ;
  • 15h30 rendez-vous devant Notre-Dame pour ceux qui ne peuvent pas marcher ;
  • 16h entrée dans la cathédrale et passage de la Porte Sainte
  • 17h15 Vêpres

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