Catégorie : REGARD DE L’AUTRE Page 1 of 4

Méditation sur un pot de crème

Une amie m’a offert récemment un gros pot de crème pour le corps. En l’ouvrant, j’ai découverts ces mots gravés sur le couvercle : « Your body, your soul, your rituals. » ¹ Ah, ces slogans publicitaires, ai-je pensé !
Certes, des rituels, j’en ai. Ceux du lever, ceux du coucher, et mes petits « rituels beauté », pour parler comme les magazines. Mais qu’est-ce que mon âme pouvait bien avoir à faire avec la cosmétique ? Puis j’ai songé que je ne la laissais pas à la porte, mon âme, en entrant dans la salle de bain ; elle est trop bien intégrée à mon corps. À moins que ce ne soit mon corps qui soit intégré à mon âme ? Bref, ils vont toujours ensemble, et le jour où ils n’iront plus ensemble, l’un des deux n’aura plus aucun besoin de crème revitalisante !

M’enduisant ensuite après la douche de ce produit, au demeurant fort agréable, j’ai songé que la peau chaude que je massais serait un jour aussi froide que la pierre. Du coup, j’en suis venue à méditer sur nos rites funéraires. Un corps mort, on ne le traite pas n’importe comment sous prétexte qu’il est mort. On le toilette, on l’habille. Car si, sans âme et donc sans vie, il n’est plus une personne, il reste la trace de l’être humain qu’il a été. Quelqu’un qui a vécu, corps et âme, une relation avec Dieu. D’où une nouvelle question : l’âme privée de son corps, que devient-elle ? Notre foi nous dit qu’elle passe par une nouvelle naissance, entrant ainsi dans la lumière de Dieu et dans l’attente de la résurrection de la chair. Alors, elle retrouvera son union naturelle avec le corps qui a été le sien. Autrement dit, nous croyons que notre corps participera lui aussi au bonheur qui nous est promis dans le Royaume pour l’éternité. Merveilleuse perspective, qui nous laisse cependant devant une vaste question : tout au long de cette attente, que se passe-t-il ?

Il n’a fallu que trois jours à Jésus pour que son corps d’homme soit définitivement réuni à sa nature divine. Le temps de descendre au séjour des morts et d’en remonter, entraînant avec lui toute l’humanité, comme le racontent ces icônes où le Ressuscité arrache Adam et Ève du tombeau en les tirant par la main. Mais pour nous ? D’après Saint Thomas d’Aquin, notre âme ne goutera pleinement la béatitude que lorsqu’elle sera réunie à son corps. Avec le Credo de Nicée-Constantinople, nous proclamons : « J’attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir ». Autrement dit, toute notre vie et même au-delà, nous sommes dans un immense Avent. Et dans une promesse. Car Dieu se serait-il donné la peine d’entrer dans la peau de notre humanité – et à quel prix ! – s’il n’avait pas voulu nous revêtir de sa divinité ? À quoi ne réfléchit-on pas à partir d’un banal pot de crème !

Marie-Hélène D.

¹« Ton corps, ton âme, tes rituels »

L’Épiphanie

Le terme grec épiphanie désigne une « manifestation », une « apparition », ou encore une « révélation ». Avant le christianisme, il s’agit d’un terme profane, utilisé dans le langage courant pour désigner une prise de conscience subite, un éclairage nouveau sur une situation (matérielle ou morale) assez obscure, une évidence… Le terme ‘‘épiphanie’’ a pu ainsi désigner la prise de conscience du mathématicien grec Archimède, quand il va énoncer, par son célèbre ‘‘Eurêka’’ (J’ai    trouvé !…), les bases d’une loi physique fondamentale, la ‘‘poussée d’Archimède.’’ A cette époque, le terme épiphanie faisait aussi allusion aux fêtes de la Lumière, qui commencent après le solstice d’hiver, et célèbrent l’allongement des jours, la présence du soleil auprès des hommes.

Dans l’Église catholique, l’Épiphanie célèbre le Messie, le Christ, le Fils de Dieu, qui est venu s’incarner dans le monde et s’est fait homme. En ce jour de l’Épiphanie, Jésus est manifesté aux yeux du monde. Voilà qu’il est véritablement ‘‘révélé’’ au monde, notamment par la présence et l’hommage des Rois Mages. Ces grands savants venus de l’Orient, ont appris la naissance de Jésus à Bethléem. Et, guidés par une étoile, ils viennent rendre hommage au Roi des Juifs, en lui apportant de riches présents, d’une grande valeur, à la fois réelle et symbolique.

L’Église catholique lie surtout l’Épiphanie à la visite des Rois Mages à l’Enfant Jésus. Dans l’Église orthodoxe, l’Épiphanie est plus souvent désignée par le terme ‘‘Théophanie’’, qui signifie ‘‘manifestation de Dieu’’, et elle est aussi une célébration du baptême de Jésus.

La célébration de cette fête dans la chrétienté est très ancienne, puisqu’elle existe depuis le IIème siècle !… La date de la célébration a longtemps été fixée au 6 janvier, puis au deuxième dimanche après Noël, quelle que soit la date de ce dimanche. Ainsi, dans les régions où le 6 janvier n’était pas un jour férié, les fidèles pouvaient fêter l’Épiphanie à la messe du deuxième dimanche après Noël. En France, la règle de fêter l’Épiphanie le 6 janvier a été appliquée depuis 1802, et par la suite, en 1971, le deuxième dimanche après Noël a été choisi comme date de l’Épiphanie.

Pour rester dans la joie de la présence du Seigneur parmi nous, cette prière anonyme nous aidera :

 Seigneur Jésus-Christ,

Toi qui as transformé la grisaille de ma vie quotidienne,

Pour faire surgir devant moi la lumière de Ta magnificence divine,

Fais-moi découvrir la puissance et l’éclat de Ta Résurrection,

Pour éclairer ma vie d’un jour nouveau, dans mon travail, mes déplacements,

Mes déceptions, mes relations, ma solitude, et dans la banalité de mon quotidien !…

Fais-moi reconnaître que, depuis le seuil de l’Éternité, tu es entré dans ma vie,

Afin de lui faire découvrir la douce lumière de ton amour, avec toutes ses exigences…

Marie

Noël est passé

Ca y est, Noël est arrivé ! Le Temps de l’Avent qui nous y préparait en travaillant le Pardon, la Foi, la Joie et la Paix a pris fin. On peut ajouter à ces valeurs celles de l’Amour, de la Simplicité, de la Sobriété, de l’Accueil du Pauvre – leçons de la crèche où est né le Divin Enfant.

Ce qui m’interroge depuis tant d’années, c’est l’écart grandissant entre ce Noël chrétien qui nous met en joie en paroisse, et le vécu réel de ce temps de Noël en famille.

•La pauvreté et la simplicité de la crèche sont confrontées à l’opulence des cadeaux et des repas, des déchets

•Le pardon, la paix et la joie sont confrontées à l’appréhension des retrouvailles des discussions avec le tonton jugé raciste, machiste, xénophobe ou d’extrême-droite ou avec la nièce gauchiste, végé ou vegan et féministe, avec le neveu trop libéral, avec le beau-frère trop « beauf », la cousine trop dépressive, la belle-fille qui a choisi Marie et non Marthe… sans parler des différences de caractères…

Noël met à l’épreuve nos capacités réelles d’accueil de la différence de l’autre, au sein de nos propres familles. Noël rassemble dans une même pièce des visions du monde aux antipodes, des inquiétudes… Comment espérer une situation politique stable si nous-mêmes n’arrivons pas à supporter la différence de l’autre le temps d’un repas ? Dans une période de tensions, qui exacerbe les positionnements politiques et militants des uns et des autres, comment réussir à nous désarmer intérieurement pendant quelques jours ?

Il y a un véritable enjeu à cela : le maintien de cette fête.

J’observe dans mon entourage déjà un certain recul. Certains ont jeté l’éponge, et ne fêtent plus Noël en famille, mais entre amis ou alors plus tard le 27 ou le 29 décembre. Certains subissent d’être privés de Noël car se retrouvent seul(e) quand les parents sont décédés, quand les enfants ont grandi et sont à l’étranger, ou dans la belle famille, ou quand les histoires de famille, aux séparations, aux non-dits ont triomphé…

Joyeux constat 4 jours après Noël me direz-vous… Si je le dresse, ce n’est pas avec l’idée d’accabler, mais de réveiller notre charité, notre espérance et notre créativité.

Comment continuer de faire croire à Noël ? Comment faire déborder l’Amour chrétien autour de nous à Noël ? Quelles voies pour ouvrir des voies ? Comment montrer l’exemple?

Sur internet vous trouverez de nombreux conseils de « Noël Laudato Si’  » pour lutter contre la déferlante d’objets flambant neufs et d’emballages, (objets de seconde main, les emballages en tissu, les cadeaux immatériels (massage, ciné, spectacles…)…)

Mais les idées de « Noël Fratelli Tutti » sont moins répandues : peut-on réapprendre à accueillir celles et ceux qui sont seuls pour Noël (pas juste en laissant une assiette symbolique) ? le temps d’un apéro ou du dessert pour commencer ? inciter nos amis militants à une trêve de Noël, les inciter à l’écoute ? Si nous avons la chance de vivre de vrais Joyeux Noëls, comment les ouvrir à celles et ceux qui en sont privés pour les y faire goûter ? Je n’ai pas de réponse, mais à l’heure des bonnes résolutions, nous avons maintenant un an pour y réfléchir.

Pauline HÉNAFF

On a tous quelque chose en nous d’Isaïe

Depuis plusieurs années maintenant, je vis le temps de l’Avent accompagnée quotidiennement par la voix de mon prophète préféré, le grand Isaïe.

Je dis préféré car il me semble qu’il en va des prophètes comme des Saints : certains ont le don de savoir susurrer personnellement à notre oreille et nous font plus que d’autres cheminer vers Dieu. Ce sont en quelque sorte nos « chouchous en Christ » – je doute que cette expression fasse date.

Si la méditation de la Parole est un excellent pain quotidien de l’Avent, un autre beaucoup plus amer est celui de l’actualité. Et non, la réouverture de Notre-Dame ne suffit pas à elle seule à endiguer le flot de souffrances que trop de nos frères et sœurs, et « sœur notre mère la Terre » comme priait Saint François d’Assise subissent au quotidien.

« Seigneur, comment vivre ici-bas en gardant l’Espérance ? »

C’est par ce cri adressé à Dieu que j’ai reçu de re-contempler la prophétie d’Isaïe au-delà de son message principiel pour nous Chrétiens : la venue d’« un rameau (qui) sortira de la souche de Jessé »,* notre Christ Jésus.

Et à cette aune, 

… quand je désespère face au marasme des réseaux sociaux et des fake news, je me souviens qu’ « Il ne jugera pas sur l’apparence ; il ne se prononcera pas sur des rumeurs »

… quand je pleure les inégalités sociales dont est percluse notre société, je me redis qu’ « avec droiture, il se prononcera en faveur des humbles du pays »

… quand je suis pétrifiée face au Mal, je ferme les yeux et vois qu’un jour « Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble. »

… quand l’angoisse face au désastre climatique m’étreint, je m’accroche à l’horizon où « le lion , comme le bœuf , mangera du fourrage »

… quand malgré tout la charge est trop lourde, j’appelle à moi « l’esprit du Seigneur:  esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur »

La voix des prophètes résonne encore, celle du Seigneur l’a accomplie : à nous toutes et tous de la faire vivre par la prière et par l’action.

Car comme me l’a dit une chère Amie : « On a tous quelque chose en nous d’Isaïe »

Bon temps de l’Avent à tous et toutes !

Aline

*Les passages en gras sont tirés du Livre d’Isaïe , (11,1-10)

MYSTERIUM LUNAE

«  Le monde est en feu ! » écrivait au 16e siècle Sainte Thérèse d’Avila. Elle pourrait hélas écrire la même chose cinq siècles plus tard, en ajoutant aussi que l’Eglise est malade… De fait, dans un contexte général déjà difficile de déchristianisation de notre société, le scandale des abus cléricaux et sexuels dans l’Eglise, avec ses trop nombreuses victimes en souffrance, mine sa visibilité, son autorité, sa crédibilité, allant même jusqu’à faire redouter, chez certains, sa disparition.

Qui connait un peu l’histoire pluriséculaire de l’Eglise saura qu’elle n’en est pas, loin s’en faut, à sa première crise grave ! La sombre histoire de l’Inquisition, surtout espagnole, alimentée par un antijudaïsme virulent, condamnant les juifs à la conversion forcée au christianisme ou à l’exil, en est, hélas, une des illustrations les plus douloureuses, dont il existe encore de lointains descendants, qu’on appelle des marranes…
Alors, face à cette situation, devons-nous nous décourager et être tentés de quitter l’Eglise ? Certainement pas ! Quitte-t-on une mère ?

Ce sont nos Pères de l’Eglise, une fois de plus, qui, par delà les siècles, viennent à notre rescousse pour nous réconforter et regarder l’avenir avec sérénité. En utilisant une belle, juste et exaltante métaphore ! Pleine d’espérance ! Ils comparent l’Eglise à la lune. La lune, en effet, resplendit mais sa lumière n’est pas la sienne, c’est celle du soleil. Elle reflète sa lumière. Ainsi l’Eglise ne possède pas sa lumière d’elle-même mais du Christ. C’est ce que les Pères de l’Eglise, et en particulier Saint Ambroise de Milan, ont appelé le « mysterium lunae« , le mystère de la lune. Tout ce qui va dans le sens contraire à celui de la tradition de l’Eglise ne doit pas nous troubler. Parce que nous savons que c’est finalement le Christ lui-même qui tient la barre ! Pour paraphraser le vieil adage, « hors du Christ, point d’Eglise »!

La crise actuelle est un feu purificateur. Elle appelle à une conversion radicale de cœur et d’esprit. C’est l’Evangile qu’il nous faut vivre !

L’Eglise est « le germe et le commencement sur terre » du Royaume de Dieu annoncé par Jésus, comme l’a si bien proclamé le Concile Vatican II dans sa Constitution Lumen Gentium…

 Edmond Sirvente

Page 1 of 4

Fièrement propulsé par WordPress & Thème par Anders Norén